Bon, après le magnifique CR du guerrier Gallois, j'y vais un peu du mien !
Car il faut bien évacuer un peu cette journée de samedi, somme toute apocalyptique...
Nice et sa canicule resteront un souvenir merveilleux malgré le lot de souffrance et de combat contre la chaleur.
Gérardmer un cauchemar de pluies (heureusement pas trop glaciales) pendant plus de 9 heures, sans une seconde d'arrêt,
Comme le dit Neil, il fallait aller chercher la motivation très très loin dans nos esprits. Le combat Neil-Zarma-Nico était un beau prétexte aux trois compères!
De mon côté, j'ai dû faire appel à une petite astuce : transférer mon inscription "Open" en "Classe d'âge", avec en tête d'espérer sans trop vraiment y croire, de ne pas trop mal figurer sur cette course Championnat d'Europe (non mais!). Mais bon, vue la préparation plutôt douteuse après l'heureuse compensation Niçoise, le nombre d'andouillettes-Chablis du mois d'août, les repas hilares au restaurant de Gérardmer à se moquer des autres triathlètes européens totalement émaciés et effarés de nous voir commander Pizzas/Bières/Profiteroles au chocolat la veille de la course, + un tendon d'Achille qui criait "Stop : fin de saison !!!!"... Avec tout cela, je ne me faisais pas trop d'illusions : 1 chance sur 3 de terminer dans des conditions météo normales.
Reconnaissance du tour vélo avec Neil la veille : sous un soleil magnifique, les cols montés à presque 20 de moyenne, des descentes où l'on peut vraiment attaquer à plus de 60 sans forcer, je me dis que demain cela va être un massacre !
6 heures, on voit encore les étoiles
6 h 30, on ne voit même plus le balcon du chalet tellement il pleut...
Rien que d'aller à la voiture = trempé
Le dépôt des sacs se fait sous des trombes d'eau : sur le sac blanc est imprimé "WetSuits", il y a de quoi rire s'il reste encore un peu de second degré dans un coin du cerveau... ce sont ces mêmes "WetSuits" qu'on retrouvera à la fin de la journée et qui nous rappelleront que la limite a été dépassée depuis longtemps, et qu'à part l'hypothermie, il n'y a plus d'autre issue...
En ayant un dossard "Classe d'âge", j'ai la chance de partir en première vague 10 minutes avant la course Open et avec l'élite, rien que ça !
Je suis fier comme Artaban !
Du coup, pas de coups de nageoires de pingouins furieux, je n'ai jamais eu un début aussi cool et rapide en action. J'ose ce que je n'avais jamais osé : je me cale derrière un groupe de 2 ou 3 qui avaient l'air bien carrés, et je me laisse emporter tranquille, sans forcer dans leur courant. Et en plus ils naviguaient comme des chefs, des trajectoires rectilignes comme si un fil les guidait, des tours de bouées au ras des cordeaux ! J'ai bien eu la tentation de les passer 3 ou 4 fois car je sentais que j'avais le "moteur", mais je me suis bien ravisé de le faire quand je me suis décalé et que j'ai essayé de viser une bouée : tout d'abord j'ai cru que mes lunettes s'étaient remplies d'eau, mais en fait il pleuvait tellement fort que les gouttes rebondissaient à la surface du lac et formaient un rideau totalement opaque
Les bonnets bleus de la course "Open" ne me passent qu'après 3000 m : Good Swim, je me dis !
Et là, maintenant sortis du lac, on plonge dans la piscine du parc à vélo : tout baigne, c'est le cas de le dire. Les sacs de vêtements qui s'étaient avérés fragiles sont plus ou moins déchirés, résultat : la tenue vélo est déjà ruisselante… Mettre le plus de couches possible pour éviter le froid : 2 paires de chaussettes, des gants longs, trois couches pour le haut dont une imperméable et puis floc, floc, c'est parti pour retrouver le vélo dégoulinant et froid. Je ne mets pas mes lunettes correctives évidemment opacifiées par la buée et les gouttes : j'y vois pas à 5 mètres, mais c'est parti
Alors qu'est-ce qui peut bien motiver à ce moment-là ???
Heureusement qu'il y a les "amis-ennemis" : ne pas se faire reprendre par Neil-Zarma-Eric and C° partis 10 minutes derrière, allez, va pour ce challenge, mais faut vraiment être malade profond pour se lancer sur 120 kms dans ces conditions.
Pour une fois, en partant avec l'élite et les cracks européens, je ne joue pas au "packMan" en vélo, je me fais même passer puis cela se stabilise et je resterai dans les mêmes groupes toute la course, remontant certains dans les cols ou les descentes et Vice-versa. Mais alors, que ce fut dur.... La route très souvent transformée en rivière ondulante dans certaines portions de descente, et puis 9 montées, 2300 de dénivelé +, ça marque ... Bien moins rapide que le tour de la veille avec Neil, calme dans les parties montantes, et puis tant pis, j'attaque fort dès la première descente, je me dis "on verra bien" : bien appuyé sur le prolongateur, le Kalibur passe comme sur un rail dans les grandes lignes droites et les grandes courbes. Là, je vais vraiment plus vite que tout le monde et cela a été vraiment grisant, dépassant comme un turbo en regardant le compteur tourner entre 60 et 65 avec un véritable torrent soulevé par la roue arrière et qui glaçait le dos. Aujourd'hui, je me dis que j'y suis peut-être allé un peu fort dans ces descentes...
Et puis, forcément, c'est dans ces conditions que les avaries arrivent : un bidon perdu sur de grosses secousses (le Kalibur, c'est un rail, mais plutôt inconfortable) et demi-tour pour le retrouver, et puis finalement le reperdre la secousse d'après ; là, basta.
La pochette "BentoBox" qui cisaille la cuisse parce que placée dans l'entre-jambe à défaut d'être attachée derrière le guidon, place occupée par la plaque du numéro : résultat, dans la première grande descente, acrobaties de singe pour la détacher et récupérer les ravitos. Enfin, à mi-course et à l'entrée du troisième col, le boîtier de pédalier qui commence à faire un bruit d'enfer, j'ai l'impression qu'il va s'ouvrir et que je vais me retrouver avec les manivelles sous les pieds et détachées du vélo : je ne peux plus mettre de pression en appui sans provoquer ces craquements sinistres et de mauvaise augure : je passerai du coup les trois derniers cols sur le "27" à l'arrière pour ne pas trop appuyer mais la moyenne de 16-20 dans les montées chute à 11-13. Bah, finalement je me dis que j'aurai les papates plus fraiches pour la course.
A moins de tout arrêter maintenant parce que, là, franchement, après 4h30 dans ces conditions, faut vraiment être un peu bancale du ciboulot pour continuer... Ah, tiens, Neil et Zarma ne m'ont pas repris
Alors dans ce cas, je continue !!!! Et puis c'est un championnat d'Europe où je serai classé en V3H, merde !!!
Re-transition avec vêtements dégoulinants, changés pour d'autres à peu près dans le même état.
Début de course, je rentre dans ma coquille, là il n'y a plus personne, je suis tout seul dans ma tête et dans mon corps, je fais abstraction de tout le reste, il faut y aller, j'y arriverai, 30 kms c'est rien du tout, 3 heures c'est rien du tout, une grosse contracture dès le premier 1/4 d'heure, j'y pense pas, un tendon à droite fusillé, une cuisse à gauche out, je ne dois pas être très beau à voir courir mais tant pis. Enfin je vois les amis me passer, ouf ! je me sens finalement rassuré par cet ordre des choses et cela me poussera jusqu'au bout.
Je vois le chrono en 09 09 09 quelques secondes avant de passer la ligne : je trouve cela finalement très beau, ces chiffres tous pareils. C'est bizarre l'état des choses à ces instants-là...
Bon après, vaut mieux pas raconter : les pâtes qui ne pouvaient pas atteindre la bouche à cause des tremblements et grelottements, la Croix Rouge en manque de couvertures de survie, le retour pour chercher les sacs et le vélo toujours sous la pluie, et le spectacles de nous tous, un peu hagards mais heureux de savoir que tous étaient bien là, course bouclée ou pas.
Mille Bravos à Eric et à Tibo d'avoir su s'arrêter quand il le fallait pour eux ; Dix Mille à Amélie pour ton admirable course, au trio de tête pour leur belle bagarre, à Willy et La Bombe qui n'en menaient pas large après avoir tout donné dans ce combat, à Duduche et Pat qui avaient l'air de sortir d'une petite promenade tellement il étaient beaux et souriants, et au beau relais conclu par Pascal !
Et à toux ceux qui sont restés des heures sous la pluie pour nous encourager,
et Roma !
et Ben et Mélanie !
qui nous ont donnés le lendemain une vraie et belle leçon de triathlon sur la course "Sprint"
Désolé d'avoir encore une fois bousculé vos pronostics en entrant dans le Top 5
Et Finalement dixième en V3H AU CHAMPIONNAT D'EUROPE DU MONDE, j'en reviens pas